De l'économie de la santé à l'épidémiologie: que faire si les questions de santé vous intéressent ?

Ce post cherche à présenter aux étudiants en économie intéressés par les questions de santé mais ne trouvant pas leur bonheur en économie de la santé des formations alternatives ou complémentaires dans des champs connexes. Il s'appuie sur mon propre cheminement intellectuel et offre des pistes pour faire des choix plus pertinents que ce que j'ai pu faire.

Quelques éléments issus de mon parcours

De nombreux étudiants dans des cursus d'économie généraux (par exemple dans les magistères d'économie ou d'économie appliquée) sont intéressés par le domaine de la santé, parfois sans pouvoir vraiment expliquer ce qui les attire. J'en faisais parti.

Avec le recul, je dirai que ce qui m'attirait c'était la possibilité perçue de contribuer à un domaine tourné vers les individus et leur santé, un objet d'étude davantage porteur de sens que les marchés financiers ou la monnaie, par exemple. J'imagine que des champs comme l'économie du développement ou l'économie de l'éducation peuvent attirer des étudiants pour des raisons similaires. Pour moi c'était la santé, sans doute car j'arrivais davantage à saisir les enjeux et/ou que j'étais plus sensibles à ces derniers que ceux étudiés dans d'autres champs. Les rencontres personnelles ont également joué un rôle capitale, notamment mon premier stage sous la direction d'A. Gramain.

J'ai donc commencé à aborder des questions de politiques de santé, d'offre et de demande de santé, de financement, d'équité, etc. à travers mes lectures et mes stages. Malgré les découvertes d'enjeux passionnants, j'avais l'impression d'être encore trop éloigné de sujets susceptibles de contribuer à améliorer concrètement la santé des individus. De fait, les interlocuteurs privilégiés des économistes de la santé traitant de problématiques systémiques (offre/demande de soins, financement, équité/égalité, etc.) dans les laboratoires d'économie sont majoritairement les décideurs (policymakers) et les fonctionnaires des différents ministères, pas les médecins.

La découverte de l'économie de la santé clinique m'a permis de me rapprocher d'enjeu individuelle et de m'éloigner de problématiques systémique. Ca peut être une solution si vous souhaitez rester dans le champ de l'économie tout en travaillant sur des aspects cliniques. Il y a de nombreux sujets passionnants à explorer dans ce domaine, et je vous conseille de chercher des stages dans les unités de recherche cliniques en économie au sein d'hôpitaux, auprès de chercheurs spécialisés sur ces thématiques, ou à la Haute Autorité de Santé, si cela vous intéresse. Par exemple, un sujet d'étude typique en économie de la santé clinique serait: "Traiter la pathologie X en utilisant la nouvelle procédure Y permet-t-elle une amélioration en termes de coûts-efficacité ou coûts-utilité par rapport à la procédure Z ?". Pour en savoir plus sur l'évaluation économique en santé, vous pouvez vous référer à ce post de la Haute Autorité de Santé.

Cependant, fondamentalement, l'objet central des projets sur lesquels vous interviendrait restera l'allocation efficiente de ressources limitées: si votre souhait et donc de contribuer à l'amélioration de la prise en charge clinique des malades ou à la lutte contre des épidémies, vous pourrez être vite déçus. Si c'est votre cas, c'est peut-être le moment de quitter les formations en économie et rejoindre les formations en santé publique, notamment en épidémiologie. Pour confirmer votre envie, je vous conseille d'écouter:

J'ai personnellement fait ce choix à l'issu de mon double diplôme HEC - Ensae, notamment pour me rapprocher de problématique liées aux maladies infectieuses et travailler sur des problématiques de santé globale. Plus généralement, je souhaitais rejoindre le monde des sciences naturelles et quitter les sciences sociales.

Oser le passage des formations en économie aux formations en Santé Publique

Si la santé vous intéresse et que vous souhaitez l'aborder sous un angle autre qu'économique, vous trouverez votre bonheur avec les masters en santé publique. Il en existe dans toute la France (souvent dans des UFR de médecine), chaque master ayant sa propre spécialité. Voici une liste non exhaustive de master en santé publique:

Comme vous pourrez le constater, il existe plusieurs spécialisations (un peu comme la macro et la micro en économie), chacune traitant de sujets différents. Globalement, trois types de masters ou parcours peuvent être observés:

  • Les formations orientées en Epidémiologie des populations ou Santé Globale (par exemple le master EPIPOP de Sorbonne);

  • Les formations orientées Epidémiologies cliniques (par exemple le master ECLIPE de Sorbonne ou le master de Toulouse);

  • Les formations orientées Statistiques médicales/Méthodologie (par exemple le master SMSDS de Sorbonne ou le master CER de l'Université de Paris);

Ayant un très gros intérêt pour les aspects méthodologique et théorique ainsi que les formations à dimensions internationales, j'ai choisi de rejoindre le master CER de l'Université de Paris à la rentrée 2021. Cette formation a notamment l'avantage de faire appel à des pointures internationales sur la méthodologie ainsi qu'être très liée au réseau Cochrane, fer de lance de la Evidence-Based Medicine. Mon deuxième et troisième choix auraient été le master SMSDS et le master EPIPOP.

En tant qu'étudiant en économie vous avez de très bonnes chances d'être recrutés dans ces masters, notamment car vous avez un très bon niveau en statistiques et en programmation par rapport aux autres étudiants intéressés par ces formations (i.e. majoritairement des médecins et des pharmaciens).

Si vraiment vous n'en pouvez plus de l'économie, il existe même des M1 d'économie de la santé (mais le contenu quantitatif me parait en général moins solide qu'en master d'économie). A vous de voir en fonction de votre degré de tolérance pour l'économie et vos champs d'intérêt spécifiques.

Et si je veux toujours faire de l'économie de la santé ?

...Eh bah c'est pas grave, personne n'est parfait ! Plus sérieusement, il existe quelques masters spécialisés en santé. Par exemple, à Paris:

Vous pouvez également rester dans un master généraliste (par exemple APE de PSE) et vous spécialiser en économie de la santé à travers des cours optionnels, votre mémoire et votre stage de M2 (voir notamment la page consacrée à ce sujet).